Les vacances de l'ange gardien
Il a un charme fou
son œil gauche pond des serrures
une petite fille dans son œil droit
garde les vaches
Il passe Noël dans n'importe quel thorax
pourvu qu'on lui dise "Mon cœur" avec une bouche
pleine de salive et de Nativité
Il loue une voiture Son front
est chauffeur
son rire roule pleins phares
il freine de la langue
sa voix froisse la tôle
la mort
est son meilleur profil
Loti d'un tel engin qui vivrait immobile ?
Il loue un Monde au rythme tranquille
dont les continents s'emboîtent
se déboîtent s'emboîtent
se déboîtent
s'emboîtent
en écrasant les îles
C'est le moment de se remettre à la musique
Il s'accompagne au piano
pour chanter des mappemondes
sur un air de banquise
Proche de la nature
excellent bricoleur
chaque matin il repeint les yeux sauvages
et les vieilles mouettes rouillées
chaque soir il change les joints des nostalgies
tandis que sa colère
mollement
rebouche les trous de l'amour fou
Avant de sortir il n'oublie jamais de fermer le gaz
ni d'enterrer ses chats
et
rusé
pour dissuader d'éventuels intrus il laisse allumée
sa vieille mère
Insomniaque il jubile
chaque nuit de se faire cauchemar
dans le sommeil des enfants sages
en vertu
de son droit de visite
Sa brûlante mauvaise foi passe
repasse
aplatit l'infiniment noir
Il crache la lumière
sous prétexte de pattemouille
Aux beaux jours sa mémoire se vautre
dans le moelleux des temps innocents
où il tranchait les lombrics les orvets
noyait les oisillons brûlait les araignées
et baisait ses cousines
Quel admirable appétit ! Quelle belle déclivité
du gosier !
Il dévore les vaines querelles
bâfre les dettes d'honneur
Tous les soirs dans son miroir
il picole des noeuds de cravate
Le dimanche matin il vend des yeux durs
garantis pondus par son aveugle élevé en plein air
Il solde aussi ses vieilles prières
Devant l'étal une montagne de genoux
saigne la Bonne Nouvelle
Et quand fatal
revient le jour de la rentrée
ma fatigue béante
est sa sortie de secours
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