maréchal de saxe
J'étais encore à paresser,
J'avais sommeil et le cœur gros
Et tant de choses à penser
Pour tant de choses dépassées,
J'avais sommeil et le cœur gros ;
Je me croyais un escargot
Qui porte sa vie sur son dos,
Et puis, au coin de la chaussée,
Je vis qu'on allait déchaussé,
Je vis une femme-escargot
Qui portait sa vie sur son dos.
Il faisait beau, il ventait peu ;
Il pleuvait pourtant dans mon cœur,
Malgré le soleil sirupeux,
Malgré le mercure râpeux,
Il pleuvait pourtant dans mon cœur ;
C'était une de ces artères
Portant le nom d'un militaire,
J'étais vautré dans l'engin bleu
Qui avalait le jus mielleux
Du macadam bleu des artères
De rue aux noms de militaires.
J'étais encore à rêvasser,
Mon cœur bouillait de traîtres rots
Et tant de choses dépensées
Pour tant de choses dépassées,
Mon cœur bouillait de traîtres rots ;
Je bavais comme un escargot
Qui traîne sa vie sur son dos ;
Entre les piétons enchâssés,
Marchait quelqu'un de déchaussé,
Marchait une femme-escargot
Qui portait sa vie sur son dos.
Le bus filait à toute allure,
Il rejoignait tous les feux rouges,
Un mont de parapluies, fourrures
Sacs et chair filait ma monture
Rejointe à chaque feu rouge.
On lorgnait les statues sans âge
Accrochées aux pans des murs sages,
Une gosse gâtée en pleurs
Était sans toit pour quelques heures
Entre ses copines à l'âge
Oû l'on se fout bien d'être un sage,
Oû l'on ne voit ni les statues
Courant aux murs de chaque rue,
Ni les vagabonds-escargots
Qui portent leur vie sur leur dos.
Il fait aussi beau qu'il le peut ;
Et du soleil mon cœur s'écœure,
Et tout mon bonheur adipeux
Je lui sais gré d'aimer si peu
Et du soleil mon cœur s'écœure ;
C'est la grande ville aux artères
Portant le nom des militaires,
Roulons toujours par ses rues bleues
Avalons-en le jus mielleux
Mangeons le goudron des artères
Portant les noms des militaires.
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